Instantané N° 31 février 2007

Polygalacturonase-2

A la fin de l’été, il n’est pas rare de voir des rivières de jus de tomate se déverser dans les caniveaux des petits villages de la campagne italienne. C’est l’époque durant laquelle de grandes quantités de sauce tomate sont produites et stockées pour les mois d’hiver. Grâce à leur climat, les Italiens produisent des tonnes de tomates chaque année. D’autres pays, par contre, doivent les importer. Hors, la plupart des tomates produites par les paysans italiens ne résistent pas au voyage. De plus elles ont rapidement mauvaise allure sur les étagères d’une épicerie et deviennent également vite impropres même à la fabrication du ketchup. Que faire ?

Les tomates ne sont pas des fruits commodes : non seulement elles mûrissent rapidement mais en plus elles ramollissent. Contrairement au raisin qui se ride et s’assèche, la tomate se défait et devient liquide. Depuis des années, les producteurs cherchent des moyens pour freiner le processus de mûrissement afin de pouvoir envoyer leurs tomates à l’autre bout du monde, tout en préservant leur aspect, leur texture et leur goût.

Mais pourquoi un fruit mûrit-il? Pour la pérénnité de l’espèce, une tomate – comme tous les fruits – doit pouvoir disséminer ses graines. Une fois mûre, elle peut le faire de deux manières : soit en pourrissant ou moisissant et libérer ainsi ses pépins, soit en attirant – par le biais de sa couleur ou de sa texture – un consommateur qui après l’avoir mangée et digérée, dispersera lui aussi les graines. Au niveau moléculaire, le mûrissement d’une tomate exige la collaboration de plusieurs enzymes, parmi lesquels la polygalacturonase-2. Cet enzyme dépolymérise les polyurénides, comme par exemple la pectine. Les polyurénides sont essentiels pour fabriquer la paroi cellulaire et maintenir sa texture et sa résistance. Lorsqu’une tomate mûrit, la production de polygalacturonase-2 augmente et donc également la dépolymérisation des polyurénides : les parois cellulaires se ‘relâchent’ et le fruit tout entier ramollit.

La compréhension du processus de mûrissement de la tomate au niveau moléculaire a permis la production de la première tomate transgénique dans les années 1990, tomate chez laquelle l’activité de la polygalacturonase-2 a été supprimée. Le mûrissement des tomates a non seulement été freiné, mais on découvrit également que la viscosité de la pâte de ces tomates avait été modifiée et améliorait la qualité des sauces… La découverte était commercialement alléchante mais accompagner sa salade de tomates génétiquement modifiées est encore loin de faire l’unanimité… Et la tomate transgénique, connue sous le nom de "Flavr Savr" a été retirée du marché en 1998… Toutefois, il se peut que, dans le futur, des fruits transgéniques soient une réponse à la demande des consommateurs d’avoir un choix toujours plus large de fruits quelque soit la saison et à l’exigence des mêmes consommateurs d’avoir toujours sur les étagères de leurs supermarchés favoris des fruits au ‘look’ impeccable.

  • Polygalacturonase-2, Solanum lycopersicum (tomate): P05117